« Oh putain j’ai un entretien chez Noke !

19h34 : Le cabinet de recrutement Sublica me notifie un entretien pour dans 2 jours afin que je puisse rencontrer le Directeur Commercial de la société Noke : Just do it !

A trop solliciter les cabinets, à passer un temps incroyable sur LinkedIn et à mettre mon CV sur tous les jobboards de la planète, ça me pendait au nez de rencontrer un nouvel employeur. Et quel employeur !

19h36 : Après le « choc psychologique », conséquence directe de cette nouvelle, je réfléchis à mon organisation. Je ne peux pas y aller sans me préparer, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, même si le cabinet m’a donné une très bonne fiche de poste. L’enjeu est de taille : changer d’entreprise, sortir de ma zone de confort, apprendre de nouvelles techniques de vente, gagner de nouveaux clients, se faire apprécier… Il faut que je montre le meilleur de moi, mon agressivité commerciale, ma pugnacité… C’est décidé, ce soir je vais courir pour me défouler et évacuer le stress.

21h07 : Après quelques étirements nécessaires pour éviter les courbatures et la démarche chaloupée « J’ai fait un marathon avec zéro entraînement ! », je me mets devant mon PC. Par où commencer ? Je vais tout d’abord sur le site de l’entreprise Noke.

Il me faut de la matière pour pouvoir répondre aux questions, en poser et challenger mon interlocuteur. Après ça, je dois trouver des infos sur les collaborateurs, la réputation de l’entreprise quant à son climat social, même si elle n’est plus à faire, mais avant tout, « googleiser » la personne qui va me recevoir.

Oh la vache !… Je commence à avoir les mains moites… Le directeur commercial qui me reçoit a un palmarès de dingo ! A commencer par une formation prestigieuse. Je vais avoir l’air d’une truie violette face à lui… Mais qu’est-ce qui a pu lui plaire dans mon CV ? Le doute s’installe, typiquement féminin… C’est avant tout notre force à nous les femmes, non ?

Je reprends point par point les lignes de mon parcours pour en extraire la substantifique moëlle commerciale. Il faut absolument que j’identifie ce qui, dans mes expériences de commerciale, peut séduire ce « Sales Ponte ».

Il va certainement me demander quels résultats commerciaux j’ai pu réaliser, mes métriques, mes KPI, mes performances, mes réalisations, mes réussites, mes échecs… Allez, je me replonge vite dans mon passé professionnel. Une commerciale ça ne se recrute pas sur de belles paroles ! Il faut de la matière, des faits concrets, du tangible.

23h35 : 7e cigarette de la journée. Fumer c’est mal et en plus il parait que ça tue !!!

Les recherches sur l’entreprise m’ont données une fringale ou alors c’est la clope. Un dwich, une claque et au lit. J’ai encore du boulot demain pour parfaire ma préparation. Je suis une athlète… je prends soin de mon corps, et surtout j’arrête de stresser ! Tiens, je me fumerais bien une clope…

5h36 : Les oiseaux qui piaffent dehors sans se soucier du lendemain et surtout des gens qui dorment ont eu raison de ma dernière heure de sommeil. Un café bien dosé, une bonne douche, je me sape comme un 31, les escarpins et tout le toutim… je me mets en situation et j’observe mon PC comme un miroir professionnel.

Aïe ! Je sèche d’entrée… J’ai pourtant réuni assez d’informations sur cette boîte, il me semble, et sur « Commercialator » ! Alors que faire de plus ?

7h12 : Je regarde le paquet de clopes, le dessin glauque me culpabilise, et là, tout s’éclaire. Allons à l’essentiel, pas de temps à perdre, je n’ai pas la maîtrise du capital temps de toutes façons. Les bonnes questions sont :

  • Qu’est-ce que je peux leur apporter ?
  • Comment peuvent-ils continuer à me faire grandir ?
  • Ce qui me motive vraiment à les rejoindre et à quitter mon employeur actuel ?
  • Comment je me projette ?
  • Ce que je sais faire ?
  • Ce que je veux faire ?
  • Ce que je peux faire ?…

Je décide de préparer mon squelette d’entretien. Il faut que je réussisse à me détacher de mon CV et à avoir un discours clair, rassurant et sincère.

Il est vrai que pour mon âge, j’ai beaucoup d’expériences et ça peut faire peur. Mes nombreux changements peuvent faire craindre une forme d’instabilité.

Or, je ne peux pas laisser le doute auprès de mon interlocuteur, c’est à moi de plaidoyer sur mon parcours, et si je ne suis pas assez communicante et explicite, je laisserai place à l’interprétation. Rien de pire dans un processus de recrutement.

Allez ma belle… Allez ma belle…

Je suis en phase avec mon parcours.  Mon parcours me ressemble. C’est ma carte d’identité professionnelle.

11h33 : Je définis le fil rouge de ma carrière. J’assume mon parcours et défends sa cohérence. Evolution de poste en poste : vendeuse en magasin, assistante du manager du magasin, responsable ADV, commercial sédentaire, chef de secteur sur région PACA, KAM… J’ai été en constante évolution ! Je n’ai pas à rougir de mes échecs et à me gargariser de mes succès.

La tempête est passée, les vents sont favorables, j’arrive à destination…

Maintenant je sais pourquoi je veux aller à ce rendez-vous. Je serai moi, ni plus, ni moins. Je répondrai aux challenges bienveillants de mon interlocuteur de demain, je ne verrai que les aspects positifs de ses remarques et de ses éventuelles critiques. Je ne serai ni soumise ni dominante, mais comme toute bonne commerciale, proposante. Je ne suis pas la meilleure mais demain je donnerai le meilleur de moi.

Le 16 avril, je ne jouerai pas mon avenir professionnel, mais je continuerai à écrire mon parcours. »